Dmitri Bortnikov, c’est un auteur au sujet duquel je ne taris pas d’éloge, que ce soit concernant son style ou son univers biographique désenchanté, maussade, carrément déprimant, lugubre même et un peu psychédélique. Mon coup de cœur le plus grand va à Svinobourg, mais Repas de morts et Face au styx m’ont également beaucoup impressionnée. Bien sûr, nous le retrouvons alors pour le Mois de l’Europe de l’Est.
Dmitri Bortnikov, L’agneau des neiges, Payot et Rivages, 2021, 288 pages.

Je me jette rarement sur la rentrée littéraire, et pourtant, quand j’ai vu ce livre en rayon, je n’ai pu retenir ma main de le prendre ! Et je n’ai pas eu tord mais quel horrible délice que de lire Bortnikov !
C’est l’histoire de Maria, née dans le Nord de la Russie. Sa famille est très pauvre, paysans coupés du monde. Elle nait avec un pied bot, elle est seulement témoin de sa propre réalité, poupée de chiffon mal proportionnée. La vie, la guerre, la famine, la révolution la traîne à travers son pays. Ce pays qu’elle ne connait pas.
On retrouve l’incroyable capacité de Bortnikov à peindre avec des mots, avec ses expressions, ponctuations, tournures – pas seulement orales mais qui n’appartiennent qu’à lui. Un génie de la langue, de la linguistique, contemporaine et désuète, un jeu avec les tirets et les virgules, une valse qui noie le lecteur, qui l’entraine dans quelque chose d’effréné, de terrifiant et de divin, tout à la fois.
Ah Bortnikov ! Et là Russie traumatique, le froid et le voyage, la faim et l’hiver. Ces personnages qui regardent le monde de loin, derrière le brouillard, épais, épais, le brouillard ! Cet homme est un génie, l’horreur et la tristesse à chaque page, l’abandon et la vieillesse, et pourtant, l’espoir et la vie. L’horreur si vite dite, hachée de virgules, tout en poétique si particulière. Tout passe, comme le lecteur, le personnage est entraîné par sa propre vie, derrière un voile. Voile, de l’illusion ? De l’espoir ? De la mort ? On ne sait pas et là est le génie sensible de Bortnikov
C’est un roman triste, affreux, qui parle des guerres et des famines au début du XXe siècle en Russie. La mort et son odeur hantent chaque page, et pourtant, il y a quelque chose de magistral qui passe par l’écriture, la manière de raconter, la manière désespérée de raconter l’horreur.
Avec un tel billet, que les libraires se préparent à renouveler leur stock d’ouvrage de Bortnikov :-). Merci pour ta participation !
Avec plaisir ! Merci pour l’organisation de ce challenge 🙂 Ahah Bortnikov c’est toujours un coup de cœur chez moi ! J’ai vu qu’il en avait sorti un nouveau récemment, j’ai lutté pour ne pas l’acheter immédiatement !
Si tu dis que l’auteur est un génie, c’est fort! Merci!
Je ne suis pas objective : je l’adore !!! D’un style très torturé cependant.