L’homme qui savait la langue des serpents, deuxième lecture

Est-il utile de revenir sur un livre déjà chroniqué ?
Eh bien, si la démarche semble en effet un peu vaine, en tant que Barmaid toute puissante du Bar aux Lettres, je choisi de consacrer un nouvel article aux aventures de Leemet (et accrochez-vous, j’ai encore beaucoup à dire : cet article fait plus d’une page !)

Et puis surtout, c’est la première fois que je relis un livre pour le plaisir (et pas pour de la recherche) ! Cet exploit dans le cadre de la 6ème édition du Mois de l’Europe de l’Est.

Andrus Kivirähk, L’homme qui savait la langue des serpents, Le Tripode, 2015, 470 pages.

Vous trouverez mon premier article qui vous a communiqué mon enthousiasme ici. Un enthousiasme tel, une lecture qui a laissé une trace si intense dans mes souvenirs et mon âme que je l’ai relu. Une première ! Et à nouveau, un régal !

Bien sûr, c’est un univers particulier, les chevaliers, les moines, Jésus et cet étrange Dieu viennent de débarquer en Estonie qui a longtemps était non évangélisée. C’est la grande révolution culturelle, la nouveauté ultime ! Car, comme je le soulignais dans mon précédent article, c’est un livre au sujet du temps qui passe, des coutumes qui s’effacent et disparaissent, de la vie qui évolue, des souvenirs laissés. C’est un monde magique, où les humains ont appris la langue des serpents pour se faire écouter des animaux, un monde sauvage où l’on ne se nourri que de viande et où on décapite ses ennemis, et pourtant particulièrement terre à terre où la magie des hommes n’existe pas. Il n’y a pas de démons, de diables et de farfadets comme rêve les humains modernes qui ont oublié la langue des serpents. Il y a seulement les animaux, la nature, tout un écosystème qui se suffit à lui tout seul, qui fonctionne déjà bien suffisamment. Pourquoi chercher des contes quand il suffit de s’émerveiller de la force et de l’intelligence de ce qui est déjà là ?

Leemet, il est « un peu » déprimé, c’est le héros, c’est le dernier homme à savoir la langue des serpents. C’est le dernier en qui repose la mémoire des temps anciens, des temps où les humains vivaient dans la nature, dans la forêt au milieu des loups, des ours et des serpents.

C’est bien là un ouvrage particulier – et je remarque des erreurs de frappes, de relectures et de traductions que je n’avais pas vu jusque-là – mais ce n’est pas tant gênant. D’ailleurs, je pense que la traduction a essayé de garder le ton du récit qui est en effet très agréable. Très particulier, certes, mais moi il m’embarque ce bouquin.
Il me fait revivre mon enfance ce livre. Je retrouve ces sensations d’être seule au monde en plein milieu d’une forêt, à aucune portée de voix. Seule humaine dans les sous-bois, seulement la conscience qu’il y a peut-être des animaux qui grouillent quelque part. C’était grisant, ça me rappelle quand, petite, je partais seule en forêt, assez régulièrement d’ailleurs. J’ai eu plusieurs vie avant de devenir la bobo parisienne que peu de gens pourraient imaginer en train de dévaler les sous-bois avec des chiens.
Mais je m’égare – mais peut-être est-ce là que réside la préciosité de cet ouvrage – qui, finalement, est violent : il y a beaucoup de morts, beaucoup, beaucoup de sang : de la part des bêtes ou tout simplement des lubies des hommes. Mais ça n’en reste pas moins une histoire tout à fait édifiante et pittoresque que celle de Leemet, qu’on suit de son enfance jusqu’au moment où il nous conte son récit. On y découvre ses coutumes, ses amis, ses amours, et surtout, ses nombreux drames.

Tantôt amusant, le plus souvent mélancolique, parfois dramatiques et d’autres fois encore carrément épique, c’est un livre magnifique. Un vrai voyage dans le temps et l’espace, dans les croyances des uns et des autres, d’un émerveillement sans borne, même à la seconde lecture.

Qui n’avais-je pas encore convaincu de le lire la première fois ?

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15 commentaires Ajouter un commentaire

  1. J’aime beaucoup ta démarche de relire et re-chroniquer un livre pour le plaisir d’autant que de nouveau, cette lecture semble t’avoir complètement embarquée.

    1. Merci beaucoup ! Oui, l’ouvrage a été fidèle à mes souvenirs !

  2. C’est très intéressant, ce retour de deuxième lecture ! Le livre traîne toujours dans ma liste d’envies, j’espère l’ajouter à ma PAL prochainement, du coup ^^

    1. Tout de suite dans la PàL voyons !!! hihihi

      1. Si seulement X)

  3. J’étais déjà convaincue la première fois et si ce n’était pas à cause de toi, c’était à cause de quelqu’un d’autre. Mais je suis surtout intriguée par cette « traductrice » sans nom. Moi, je croyais que c’était JP Minaudier le traducteur? (Je suis rassurée de voir, après ta chronique de Tokarczuk, que tes souvenirs d’enfance à la campagne ne sont pas tous marqués par un ennui profond!)

    1. Ah oui, j’aurais en effet pu mettre son nom ! Mais en effet je ne sais pas pourquoi « la traductrice » et le « traducteur » j’ai dû confondre. Je modifie !

      (Ahah pas que !)

  4. Patrice dit :

    C’est une excellente idée de chroniquer pour la seconde fois. Je n’ai entendu que du bien de ce livre, qui me fait un peu peur à cause de son univers fantastique, mais une double-chronique va achever de me convaincre :-). J’ai en tout cas l’impression qu’on n’aura pas droit à une relecture de « La réparation du monde » sur ce blog 🙂 !

    1. Ahah non ! Déjà une lecture était de trop !
      J’avais insisté auprès de Goran pour lire L’homme qui savait la langue des serpent, mais en effet, trop « fantasy » pour lui, il n’a pas adhéré ! (et comme j’aimais beaucoup ce livre il m’a épargné un de ses articles assassins ahah !)

  5. Un coup de coeur magistral, ce livre. Je ne l’ai pas encore relu mais il est indubitablement rentré dans les livres les plus marquants que j’ai pu lire et dans mes incontournables.
    Sinon, autant j’adore relire (même si je le faisais moins ces dernières années, la faute à ma PAL), autant je ne chronique pas une seconde fois mes relectures (je suppose que je le ferai si jamais un avis différent que la première fois…), ça ne doit pas être évident de trouver quoi dire de plus, nécessitant un article supplémentaire !

    1. Comme tu dis, ce livre est tellement marquant et tellement… Foisonnant que c’est sans mal que j’ai trouvé de quoi dire, et je pense que je taris tellement peu d’éloge que je le pourrais encore et encore… Ahah !

      1. Oui, il est étonnant, passionnant et d’une richesse incroyable !

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