Le Capitalisme patriarcal – Federici

C’est un essai étonnamment facile à lire. Il montre bien en quoi le féminisme est important, essentiel, et il propose une analyse fine en utilisant le prisme de la société capitaliste, expliquant à quel point les deux sont semblables, les deux faces d’une même pièce.

Silvia Federici, née en 1942 à Parme, est une universitaire, professeure émérite de l’université Hofstra, à Long Island dans l’État de New York, où elle enseigne les sciences sociales.

Silvia Federici, Le Capitalisme patriarcal, La Fabrique éditions, 2019, 192 pages.

En effet, si on ne prend pas en compte le travail domestique, le travail de reproduction, le travail familial et social qu’engendre les naissances ou le vieillissement des membres d’une famille, on ne peut pas prendre en compte toute la société tous ces aspects. Hors du foyer, on reste bloqué d’un point de vue non seulement masculin, mais d’un point de vue masculin travailleur. Hors, cette part de la population qui est constituée d’hommes jeunes et en bonne santé représente bien moins de la moitié de la population globale. En critiquant ce fonctionnement et en appliquant ces idées à toute la sphère familiale, l’autrice va beaucoup plus loin grâce au féminisme qui nous permet aussi de repenser la population, le niveau de vie, la société dans laquelle on évolue. Ainsi, et sans le dire, ce livre montre brillamment que le féminisme est utile, est nécessaire, à toute société pour la pensée dans sa globalité, pas seulement dans le point de vue féminin, pas seulement d’un point de vue de mère, ou de jeune fille.

Marx, bien évidemment, avait vu juste en analysant le travail ouvrier et les violences inhérentes à leur condition, mais il oublié la majeure partie de la population qui ne représente pas seulement les femmes, mais tout être humain et non pas seulement les hommes capables de produire du travail à l’usine.

La page 32 du livre (de cette édition) est particulièrement violente :
« […] pour illustrer les tendances structurelles de la production capitaliste (la tendance à allonger la journée de travail jusqu’aux limites de la résistance physique des ouvriers, à dévaluer la force de travail, à tirer le maximum de travail d’une quantité minimum de travailleurs) et pour dénoncer les horreurs auxquelles les femmes et les enfants ont été soumis à chaque stade du développement industriel.
Par ces rapports, nous apprenons que des couturières mouraient par «excès de travail, manque d’air et manque de nourriture », que des jeunes filles travaillaient quatorze heures par jour sans prendre de repas ou rampaient à moitié nues dans des galeries pour remonter le charbon à la surface, ou que des enfants étaient arrachés à leur lit au milieu de la nuit, «forcés, uniquement pour survivre, de travailler », « immolés » par une machine vampirique qui continuait à sucer leur vie «tant qu’il y a[vait] encore un muscle, un nerf, une goutte de sang à exploiter». Peu d’analystes politiques ont décrit la brutalité du travail capitaliste – en dehors de l’esclavage. »

Cependant en oubliant la capacité de lutte des femmes, on les pointant du doigt comme me des victimes, ce qui était très ancré alors dans la société actuelle est dans la vision des choses de l’époque, leurs paroles étaient annihiler.
L’autrice fait la part entre l’idéologie, le rêve, les propos de Marx et la réalité, l’héritage que nous en avons et la preuve de ses limites. Ainsi elle dépasse et repenser de manière brillante le Marxisme en l’appliquant grâce à l’héritage de l’histoire que le spectacle de notre société lui offre.

Elle démontre de manière totalement incroyable, de manière limpide, l’héritage que nous possédons des femmes travailleuses, des femmes indépendante. Ce livre qui se lit comme un ouvrage bien construit est en fait un ensemble de communications et d’articles divers. Là on voit que même dans le marxisme il existait un un capitalisme flagrant par rapport au travail des femmes. Qu’il soit à l’usine ou au sein du ménage. C’est vraiment édifiant. Il met beaucoup de choses en perspective et amène à une réflexion profonde.

En plus d’exposer très clairement l’évolution de l’usine et du capitalisme, elle met un coup de projecteur sur la place des femmes pour l’analyser brillamment, tout en exposant très bien, très clairement, intelligemment, les bases de la pensée marxiste.

14 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Un essai qui semble passionnant et aborde enfin cette question du travail des femmes absentes chez les grands penseurs… masculins. La citation sur les femmes et les enfants tirés de leur lit est édifiante !

    1. Oui ! Vraiment un livre édifiant, tu as trouvé le mot ! Vraiment c’est assez clair comme essai alors que j’avais peur qu’il soit ardu, et ça donne un regard assez neuf sur l’histoire de la condition des femmes.

  2. Bibliofeel dit :

    Brillante chronique d’un livre qui semble développer une analyse complétant le marxisme avec ce nouvel apport féministe. De nouveaux espoirs et ça on en a tellement besoin actuellement. Bonne journée. Alain « Bibliofeel »

    1. Tout à fait ! Vraiment un ouvrage très intéressant ! 🙂

  3. Ca me dit bien de le lire car les sujets me parlent et m’intéressent et, connaissant cette collection, je sais qu’ils sont généralement faciles à lire et toujours super intéressants !

    1. Alors, bizarrement je ne les considérais pas comme facile à lire, car le premier que j’ai lu de cette collection m’avait donné du fil à retordre ahah ! Mais là oui, en effet facile à lire et très pertinent !
      Il me tarde d’avoir ton avis !

      1. Ah ! Alors je suis tombée sur les bons, qui sont facilement abordables. Ma lecture ne sera pas pour cette année mais elle est bien notée et j’espère avoir l’occasion de lire cet essai début 2023 =)

      2. Je te souhaite d’avoir l’occasion en 2023 !
        Moi aussi j’ai un gros travail d’organisation de lectures à faire hihi il faudrait que je m’y mette !

      3. Bon courage alors 😉

  4. An dit :

    Je ne suis pas trop férue d’essais de manière générale, mais je dois dire que la façon dont tu présentes celui-ci me donne vraiment envie de le lire.

    1. Ah ! J’en suis bien contente ! Peut-être que celui-ci te permettra de te lancer 😀
      En tout cas, vraiment intéressant, avec un regard de côté pertinent !

      1. An dit :

        J’ai noté ses références pour ne pas le perdre de vue. Merci!

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