La jalousie – Robbe-Grillet

Quel livre étrange, à la fois réussi, volontairement dérangeant, et involontairement..?

Alain Robbe-Grillet, La Jalousie, Première publication aux Éditions de Minuit en 1957, 275 pages.


C’est comme au cinéma, l’écriture est archi visuelle, elle n’est que description de focus, zoom et contre-plongées. Une description bâtie avec des trois-quarts, des plans américains, des arrières plans et des contre-jours. Des descriptions de mouvements, une bouche qui s’arrondit, une boucle qui rebondit. Des mains à dix centimètres l’une de l’autres, des bras posés parallèlement, perpendiculaire au mur. C’est une expérience étrange que cette sorte de lecture. Qui, pour vous le dire franchement, n’a pas été tout à fait de mon goût.

C’est ce qu’on appelle le « nouveau roman ». Est qualifié de « nouveau roman » un récit où l’effort n’est pas dans l’écriture mais dans la vérité. Un rejet de la narration balzacienne et à la fois un attachement à la description des objets, pour un livre composé uniquement d’objectivité, dépouillé..

Et c’est ici réussi, servant tout à fait son propos : la jalousie. Le récit nous installe à la place du voyeur, du mari qui épie chaque mouvements de sa femme et de celui qu’il soupçonne être son amant. Leurs mains à six centimètres l’une de l’autre, son index à elle joue avec une mèche de ses cheveux, lui tient son verre avec trois doigts. Ils se regardent pendant qu’ils se parlent.

Il y a une montée obsessionnelle de l’urgence de voir, d’épier, un stalkage inquiétant dont on est en première loge : que va-t-il faire ?

Cependant, le livre a mal vieilli. Il se déroule en pleine colonisation, en bon blancs en vacances, notre triangle amoureux se fait servir. On est plus que gêné par le racisme et la discrimination ambiante, les natifs sont traités comme des bêtes et des objets, à peine méritent-ils d’appartenir au décor. C’est extrêmement malaisant et désagréable à lire. Je pense que ce n’est d’ailleurs même pas écrit dans une volonté de revendication. C’était seulement la mentalité la plus naturelle des années 50… A vomir, il y a en a des tonnes des bons bouquins qui parlent de jalousie.

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