Le Plan infini – Allende

J’ouvre ma participation au challenge « en Amérique latine avec Ingannmic et Goran ! » avec une de mes autrices favorites et je suis ravie de retrouver son univers.

Isabel Allende, Le Plan infini, Livre de Poche, 1994, 472 pages.

L’autrice mélange les points de vues, au rythme de ses changements narratifs incessants entre la première et la troisième personne du singulier. C’est un peu déstabilisant, comme ça, au début. Mais franchement, on s’y habitue plutôt bien, tant la langue est jolie et claire.
Si superbement écrit, d’une écriture subtile. Malheureusement, il faut avouer que les passages narrés par le fils manquent cruellement d’intérêt à côté de la tempête de personnages si bien dépeints et de sentiments tantôt frais, tantôt rances, mais rendus avec une stylistique et une maîtrise de l’image et la métaphore folle.

Bon, j’en remet un coup sur l’écriture, mais vraiment, elle embarque le lecteur dans un ouragan. Pourtant, il n’y a pas de tonnes de descriptions, en trois phrases, quelques mots bien choisis et bien pensés, elle plante un personnage, une situation, avec une beauté brusque, une simplicité de la formule. Des expressions singulières et inventées qui glissent seules et offrent des portraits réalistes.

Mais de quoi ça parle-t-il donc, maintenant qu’on sait que c’est bien écrit ?
De la vie. En particulier celle de Gregory Reeves, ce narrateur intempestif, et des gens qui l’entourent. On le suit depuis son enfance, on le voit évoluer et vivre, on vit au travers de ses yeux une histoire de famille et d’amitié, une histoires de vies qui s’entremêlent. Les rencontres d’un jour comme celles, éternelles, les relations pérennes ou en pointillés… Les personnages sont hauts en couleur, on se place au Sud de l’Amérique, mais le récit nous fait voyager à travers le monde. On part à la guerre, au Vietnam, on adopte des enfants à l’autre bout du monde, on retourne aux sources en Amérique du Sud, on crache sur le Capitalisme américain, on se ressource en Europe… Le panel de personnages colorés fait battre notre cœur et nous fait découvrir que les faussés entre les gens sont de purs constructions sociales et mentales. C’est un hymne à l’amour de l’humanité, avec son lot de rebondissements. Sans jamais de larmoiement ou trop de sentimentalisme, au contraire, on adore tourbillonner, haïr ou s’enticher du flot des nombreux personnages. Et c’est super bien écrit – je vous l’ai déjà dit ? – une langue qui fait l’affront d’être élégante dans les scènes de sexe les plus brutales.
Encore une fois, Isabel Allende montre sa maîtrise de l’écriture, de la formule, mais avant tout, sa connaissance du monde et de l’humain.

J’étais ravie de redécouvrir son univers un peu fou, où la magie est partout et nulle part à la fois. Est-ce vrai ? Le danger à chaque coin de rue, des aventures d’enfants mais pour adulte. Car oui, souvent il y a des enfants dans ses récits mais jamais cela ne tombe dans un récit jeunesse, au contraire, ils sont bien équilibrés et bien peints. L’ambiance, c’est vraiment le point fort de ses œuvres. Dans le début de ce récit on se demande quelle est la part de magie et de vérité. Lisent-ils réellement l’avenir dans leur roulottes ? Sont-ils des charlatans ? Pour finalement être rattrapés par l’alcoolisme et la petite vérole… On découvre également un tableau critique de la politique américaine anti-immigration, qui, tristement, n’a que peu évoluée.

14 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Goran dit :

    Comme j’accorde beaucoup d’importance au style d’écriture, je ne peux noter ce titre…

    1. Je suis une grande admiratrice d’Isabel Allende je te conseille chaudement la maison aux esprits aussi

      1. Goran dit :

        Oui, j’ai cru comprendre 😉

      2. Hihihi je peux le redire encore s’il faut !

  2. Ingannmic dit :

    Merci pour cette participation ! J’ai beaucoup lu Isabel Allende (et oui, je te rejoins sur La maison aux esprits) il y a une vingtaine d’années, puis je l’ai un peu délaissée, mais ton billet me donne envie d’y replonger !

    1. Oh oui la maison aux esprits ! 😍 J’adore tellement ce livre !
      Je te souhaite de t’y replonger et de retrouver le même émerveillement !:D

  3. Madame lit dit :

    Je vais aussi lire un Allende pour ce mois. J’adore aussi sa plume.

    1. Ah super ! lequel as-tu choisi ? 😀

      1. Madame lit dit :

        Plus loin que l’hiver 🙂

      2. je ne le connais pas ! je te souhaite une bonne lecture ! 🙂

  4. J’ai beaucoup lu et beaucoup aimé Isabel Allende lors de ses premières parutions : La maison aux esprits lors de sa sortie a été pour moi une découverte extraordinaire, ce mélange de magie et de réalisme que je ne connaissais absolument pas à l’époque. Par contre, je n’ai pas lu celui-ci.

    1. La maison aux esprits à été une vraie révélation, pour les mêmes raisons que toi ! On retrouve cet univers dans Plan Infini mais c’est vrai que la Maison aux esprits reste particulièrement chère à mon coeur.

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