Moi, Tituba sorcière – Condé

J’ai eu beaucoup de mal à me faire à l’écriture. C’est bien écrit, très fluide, ça se lit vite, mais je crois que a trop grande distance qui est mise me gène. Cela aurait à la troisième personne, cela aurait été différent. Là, vraiment, la narration à la première personne aussi froide, un regard si distant sur la propre vie de la narratrice est dérangeant.

Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière, Gallimard, 1988, 188 pages.


Le roman commence par la mort terrible de la mère : la narratrice en gardera, bien évidemment, des séquelles. De la haine, de la peur, un besoin de vengeance. Mais elle raconte comme si elle n’était pas vraiment là. Elle dit que ça l’affecte, mais comme si elle ne le ressentait pas.
Du coup, nous, lecteurs, ne pouvons pas tellement ressentir non plus.

Comme si elle n’était pas là, et pourtant, elle se met en opposition avec les « invisibles », les esprits avec qui elle cause, ceux qui la protège et la surveille depuis l’au-delà. Mais voilà, la narratrice se dit en opposition avec ce qui n’est plus, mais dans sa narration elle ne parait pas plus humaine.

Ainsi, le livre est au sujet de l’horreur de l’esclavage, au sujet de ces guérisseuses qu’on appelait à tord sorcière. Le récit est plutôt triste et déprimant, c’est peut-être pour cela que l’autrice à choisi d’y mettre une certaine distance. Mais à nouveau, quand elle parle de l’invisibilisation des Noirs, alors même qu’elle n’est pas censée être esclave mais femme de ménage, mais qu’elle est tout de même à peine plus considérée qu’un pot de chambre, elle note qu’elle est invisibilisée. Comme ses proches dans l’au-delà, c’est comme si son existence n’était pas pour les Blancs. Ces remarques très justes et qui brisent le cœur, perdent de leur portée avec cette étrange narration.

Le livre nous plonge tout tout de même dans les délires sectaires et religieux d’un monde fou, un ancien Occident animé par la haine. Tituba assiste malheureusement a ce déversement de violence. Considérée comme sorcière, elle vivra de douloureuses péripéties.
Tituba parle aux esprits défunts et connait les plantes, mais il n’y a aucune sorcellerie là-dedans. Toutes femmes d’alors possédaient cette coutume, cette manière de vivre spirituelle. Parler aux Invisibles, a ceux qui nous manquent, au lieu de les prier dans des églises. Connaître les plantés, aussi, avant d’être déracinées et annihilées de leurs connaissances.

4 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Un livre que je veux lire depuis pas mal de temps je garde en tête cette narration particulière…

    1. J’ai échangé avec l’amie qui m’a prêté ce livre : elle n’a pas du tout remarqué cette particularité qui m’a gênée

  2. Madame lit dit :

    Je l’ai dans ma bibliothèque. Ce n’est une suite à «La lettre écarlate»? Je veux le lire depuis un bon bout temps…

    1. Je ne connais pas La lettre écarlate… Mais je ne pense pas que ce soit une suite cela n’en a pas l’air

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