Portes closes et œuvres invisibles – Riout

J’ai mis un temps considérable pour arriver au bout de ce livre. Et pourtant, ce n’est pas tant sa taille, bien que j’aurais appréciée qu’il fasse partie du Challenge Un pavé par mois, mais c’est surtout sa densité qui le rend aussi complexe et long à lire.

Denys Riout, Portes closes et œuvres invisibles, Gallimard, avril 2019, 356 pages.

portes-closes-et-oeuvres-invisiblesCe livre est fascinant et peut faire écho en la Photogénie de l’Exposition. Appelé musée imaginaire, on considère toutes ces œuvres photographiques qu’on possède aisément reproduits dans les livres ou au détour d’un poster, ne sont en fait qu’un vaste musée. Un musée qui se balade, mais un musée imaginaire, nous possédons des visuels de choses que nous-mêmes n’avons jamais vus. Ils sont la trace, la preuve, que cette œuvre à laquelle nous ne pouvons accéder existe.

C’est justement ce qui nous intéresse dans cet ouvrage, si, en effet, j’ai dit qu’il est si dense que ça le rend un peu difficile à la lecture, il n’en demeure pas moins passionnant. J’ai mis du temps à le lire, mais du bon temps, même s’il m’a duré un bon bout de temps… Bref, comment voir une œuvre invisible ? En se focalisant sur les traces qu’elle laisse, une réelle enquête se déroule à travers cet essai. Que sont les œuvres invisibles, et quels témoins en avons-nous ? Une œuvre enfouie, sans autre preuve que la parole d’artiste : l’œuvre est-elle réelle ou la parole de l’artiste – qu’on est libre de croire ou non – fait-elle œuvre ? La présence d’un cartel rend-t-elle l’œuvre enfouie plus réelle ? Que dois figurer sur ce cartel ? Une question fascinante, d’ailleurs, Daniel Buren a semé quelques œuvres vouées à êtres cachées derrières d’autres tableaux, dont seul le cartel fait voir. Ressentir la présence de l’œuvre, savoir la présence de l’œuvre suffit-elle à faire œuvre ? Enfin, l’art olfactif, l’art sonore, sont-ils réellement invisible du moment où ils peuvent être ressentis ? D’où vient ce culte de l’invisibilisation de l’œuvre, courant dans l’art contemporain qui tente de renverser les codes visuels, allant jusqu’à enfouir des reliques sous Montparnasse, mais qui pourtant n’est pas un culte nouveau : une tradition à longtemps voulu qu’on couvre d’un linge un tableau pour pouvoir le découvrir lors d’un vernissage, comme un levé de rideau.

Cela est tant de questions et d’analyses présentes dans ce livre fascinant. D’autant plus que les exemples sont pertinents et parfois relèvent réellement du fun-fact dont la culture populaire est si friande. Ainsi, c’est un livre qui, s’il est un peu difficile à lire – à mon sens – mérite tout de même qu’on s’y attache, car, au-delà des questionnements de l’esthétique pure, il y a réellement la découverte d’un monde qui nous entoure, d’une manière de faire de l’art et de penser l’art tout à fait fascinent, avec des exemples à la portée de tous : qui s’apparentent à la vie de tous les jours.

4 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Goran dit :

    Comme fascinant revient à plusieurs reprises, c’est que ce texte doit vraiment l’être…

    1. En effet 😉 il apprend énormément de choses !!!

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